Rust Belt et Sun Belt : un jeu de chaises musicales
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Des amis, l’autre jour, à la campagne, alors que nous cueillons des champignons, m’expliquent le plus sérieusement du monde que la célébrissime Flore laurentienne, du frère Marie-Victorin, fait maintenant l’objet d’une application iPhone. Il n’y a qu’à braquer l’appareil sur la fleur ou l’arbuste aperçu et la fiche apparaît. Nous nous extasions. Et je me promets bien d’acquérir l’application en vue de nos prochaines randonnées.
En réalité, il n’en est rien. Une telle application n’existe pas, même s’il existe bien une édition interactive de l’ouvrage (florelaurentienne.com), ce qui n’est pas tout à fait la même chose. L’application décrite par mes amis en cueillant des champignons relève du désir présenté comme un fait. Ce n’est pas la première fois que chacun se montre disposé à prendre ses désirs pour la réalité. À cette différence près que la réalité technologique, qui dépasse régulièrement l’entendement, crée plus que jamais dans les esprits un terrain favorable à la crédulité et au coup de baguette magique. Les adultes sont devenus des enfants qui veulent croire, qui croient déjà tout ce qu’on leur dit, voire ce qu’on pourrait leur dire au sujet des prouesses de la divine technologie. S’agissant de La Flore laurentienne, la chose est d’autant plus crédible, qu’à l’heure actuelle, certaines flores imprimées ont sans doute déjà conçu une application, éventualité qui n’a rien d’extravagant en soi. De modestes flores ont pu le faire. Mais la patiente, la scrupuleuse Flore laurentienne, aux milliers de fiches, aux suaves noms latins et vulgaires, aux croquis patients du frère Alexandre, comment pourrait-elle être réduite à un dispositif ingénieux, facile, convivial et rassurant sans se voir elle-même dénaturée et sans dénaturer le réel qui, lui, est proliférant, étrange et déroutant? Impensable : la Flore laurentienne est la réalité même, traduite en mots. Moyennant quoi, dans ce paysage d’avant l’industrialisation que le frère Marie-Victorin avait sous les yeux, qu’il a ratissé de long en large au moment de rédiger ses fiches, j’avance, machette à la main, et comprends que je dois savoir m’y perdre pour mieux y vivre, les yeux ouverts.
© Marie-Andrée Lamontagne 2012
Marie-Andrée Lamontagne est écrivain, éditrice, journaliste et traductrice. Chez Leméac Éditeur, notamment, elle a publié un roman (Vert), un recueil de nouvelles (Entre-monde) et un récit (La méridienne). De 1998 à 2003, elle a dirigé les pages culturelles du quotidien québécois Le Devoir, où elle collabore encore à l’occasion. Elle prépare actuellement une biographie de la romancière et poète Anne Hébert (à paraître aux éditions du Boréal).
[Photo: Martine Doyon]
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Je n’ai pas choisi le sujet, il s’est imposé à moi lorsque j’ai vu ces dizaines de femmes cassant des pierres au bord du fleuve Congo pour pouvoir survivre après le conflit.
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